Montaigne dissertation des Cannibales et Des Coches. Nous te proposons une synthèse sur le parcours « Notre monde vient d’en trouver un autre » et sur les deux essais « Des Coches » et « Des Cannibales » de l’auteur humaniste, Michel Eyquem de Montaigne, sous la forme d’un sujet de dissertation type bac.
François Hartog déclare que « dire l’autre c’est bien évidemment une manière de parler de nous. » Vous répondrez à cette affirmation en vous appuyant sur des exemples de « Des Coches » et « Des Cannibales » de Montaigne ainsi que dans le parcours « Notre monde vient d’en trouver un autre ».
1. MONTAIGNE DISSERTATION DES CANNIBALES ET DES COCHES Analyse du sujet
Quelles sont les limites du sujet ? Autrement sur quelles autres peux-tu précisément t’appuyer ?
- « Des Coches »
- « Des Cannibales »
- le parcours « Notre monde vient d’en trouver un autre »
Ensuite quelle question est précisément posée sur ces œuvres ?
- « l’autre » : celui qui n’est pas soi, l’indigène
- « nous » : Montaigne ou les Européens
- « manière de parler » : forme du texte de Montaigne, démarche analytique entreprise
Reformulation : Est-ce que parler de l’autre suppose forcément de parler de nous ?
2. MONTAIGNE DISSERTATION DES CANNIBALES ET DES COCHES Problématique
Comment l’essai permet-il simultanément d’interroger l’autre et soi-même?
3. MONTAIGNE DISSERTATION DES CANNIBALES ET DES COCHES Plan détaillé de la dissertation
I) Dire l’autre pour se dire soi-même
En effet, parler de l’autre consiste également à parler de soi.
A/ L’autre comme gage d’authenticité
Ainsi, dans « l’avis au lecteur », Montaigne indique d’emblée : « car c’est moi que je peins ». Or, il établit tout de suite un parallèle avec les peuples primitifs qui incarnent l’authenticité. Par exemple : « Si j’étais né parmi ces populations qu’on dit vivre encore sous la douce liberté des lois primitives de la nature, je me serais très volontiers, je t’assure, peint tout entier et dans la plus complète nudité. »
B/La pensée des autres et celle de Montaigne
Ensuite, Montaigne s’appuie énormément sur la pensée d’autres pour mieux trouver la sienne. Effectivement, les Essais reposent sur des citations nombreuses et variées de penseurs de l’Antiquité. Citons à titre d’exemple : « Moins on a peur, moins on court de risques ». Montaigne cite Tite-Live dans « Des coches » afin de réfléchir sur l’appréhension humaine du danger.
C/L’essai et la comparaison
Enfin, les Essais reposent sur un grand nombre de comparaisons entre peuples européens, auquel Montaigne s’inclut, évidemment, et peuples dits « barbares ». Prenons l’exemple des « Cannibales », au cours de la rencontre à Rouen à laquelle Montaigne accompagne le roi. La richesse française et les injustices sociales sont mises en évidence.
II) A la rencontre du monde nouveau
Dire l’autre pour mieux comprendre le monde nouveau (le nouveau découpage géographique suite à la Découvert de l’Amérique par Christophe Colomb)
A/Des peuples plus authentiques
Montaigne prend toujours la défense des plus faibles. D’ailleurs, il sera l’un des artisans de la réconciliation entre protestants et catholiques lors des guerres civiles. De même, il prend le parti des peuples indigènes face à l’arrivée des Européens dont il défend les valeurs morales simples. En effet, dans « Des Cannibales », la rencontre avec celui qui est le chef des Indiens est significative. Celui-ci lui explique que son apanage de chef consiste à passer devant ses hommes lorsqu’ils vont à la guerre. De plus, en dehors des périodes de guerre, le chef a la chance que l’un des hommes de son peuple coupe la végétation sur son passage. En outre, Montaigne évoque même la métaphore filée d’un peuple dans son enfance
B/Des êtres courageux
Dans « Des coches » comme dans « Des Cannibales », Montaigne met en relief leur âpreté au combat. En effet, dans « Des Cannibales » Montaigne écrit : « c’est chose émerveillable que la fermeté de leurs combats, qui ne finissent jamais que par meurtre et effusion de sang ». De même, dans « Des coches », l’essayiste dit : « Quand je considère l’ardeur indomptable avec laquelle tant de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants se sont exposés tant de fois à des dangers inévitables ».
C/L’éloge du relativisme culturel
L’exemple le plus évocateur du relativisme culturel est probablement la défense d’un peuple considéré de manière très péjorative car « Cannibale », en témoigne le titre. Or l’auteur s’efforce de montrer, d’une part, que cette tradition s’inscrit dans une volonté de partage communautaire et, d’autre part, Montaigne met en relief les pratiques cruelles des Portugais. Effectivement, ces derniers prennent un grand plaisir à faire souffrir leur prisonnier de guerre. Montaigne conclut avec amertume : « Ils abandonnèrent alors peu à peu leur ancienne façon de faire, et adoptèrent celle des Portugais. Je ne suis certes pas fâché que l’on stigmatise l’horreur et la barbarie d’un tel comportement ; mais je le suis grandement de voir que, jugeant si bien de leurs fautes, nous demeurions à ce point aveugles envers les nôtres ». (Voir commentaire de texte du passage)
Ainsi, Montaigne montre un grand intérêt et une réelle ouverture quant à la découverte de ce peuple nouveau mais cette découverte apparaît également comme l’occasion de poser un regard critique sur le peuple européen.
III) Dire l’autre et soi-même pour exercer un regard critique sur son propre peuple
A/La critique des Européens
En effet, le regard porté par l’étranger, tel que le pratiquera notamment Montesquieu dans Les lettres persanes au XVIIIème siècle permet de faire apparaître les curiosités de notre propre fonctionnement. Or, la rencontre avec l’indigène met en lumière l’aberration qui consiste à considérer un petit garçon comme un roi. Or, le roi Charles IX a alors 12 ans et commande des hommes beaucoup plus âgés et beaucoup plus forts physiquement. Ainsi, l’étrangeté du fonctionnement monarchique et de l’application du pouvoir politique sont accentués. De plus, l’indigène s’étonne des injustices sociales qui gangrènent la société française, il exprime même sa surprise dans la mesure où les plus pauvres semblent ne pas vouloir se révolter.
B/Le refus des préjugés et de l’ethnocentrisme
A de multiples reprises, Montaigne s’insurge face à l’ethnocentrisme. Il a alors recours à l’ironie pour mieux mettre en exergue le fait que déconsidérer ces peuples est infondé. Citons par exemple « mais quoi, ils ne portent point de hauts-de-chausse ». Cette formule saillante vient ponctuer « des Cannibales ». Il vient de montrer le bon sens et les valeurs justes qui prévalent chez les indigènes et les injustices sociales qui régissent la société française. Il indique par là que l’Européen et le Français en particulier, considère l’indigène comme inférieur simplement parce qu’il n’a pas la même apparence et qu’il ne porte pas de vêtement.
C/La critique de la colonisation
Enfin, dans « Des coches » comme dans « Des Cannibales », Montaigne montre la terrifiante réalité de la colonisation. Montaigne met en évidence l’opposition entre les conséquences futiles, l’enrichissement de l’Europe, et les conséquences, l’asservissement et le meurtre des peuples primitifs. Nous pouvons notamment citer une tournure évocatrice : « Tant de villes rasées, tant de nations exterminées, tant de millions de peuples passés au fil de l’épée, la plus riche et belle partie du monde bouleversée, pour la négociation des perles et du poivre ».
MONTAIGNE DISSERTATION DES CANNIBALES ET DES COCHES : pour aller plus loin
-Commentaire de texte d’un extrait « Des Cannibales » (sur les pratiques cannibales)
-Editions des Essais (présentation)
–Fiche sur la pensée de Montaigne dans Les Essais (« Des coches » et « Des Cannibales » surtout)