Le rouge et le noir la rencontre (chapitre 6). Nous vous proposons l’extrait de texte concerné, puis la lecture linéaire de cette scène de rencontre amoureuse.
Julien Sorel, fils de paysans, vient d’être engagé par M. de Rênal comme précepteur de ses enfants. Il se présente à la porte de la famille Rênal.
Avec la vivacité et la grâce qui lui étaient naturelles quand elle était loin des regards des hommes, Mme de Rênal sortait par la porte-fenêtre du salon qui donnait sur le jardin, quand elle aperçut près de la porte d’entrée la figure d’un jeune paysan presque encore enfant, extrêmement pâle et qui venait de pleurer. Il était en chemise bien blanche, et avait sous le bras une veste fort propre de ratine violette.
Le teint de ce petit paysan était si blanc, ses yeux si doux, que l’esprit un peu romanesque de Mme de Rênal eut d’abord l’idée que ce pouvait être une jeune fille déguisée, qui venait demander quelque grâce à M. le maire. Elle eut pitié de cette pauvre créature, arrêtée à la porte d’entrée, et qui évidemment n’osait pas lever la main jusqu’à la sonnette. Mme de Rênal s’approcha, distraite un instant de l’amer chagrin que lui donnait l’arrivée du précepteur. Julien, tourné vers la porte, ne la voyait pas s’avancer. Il tressaillit quand une voix douce lui dit tout près de l’oreille:
– Que voulez-vous ici, mon enfant?
Julien se tourna vivement, et, frappé du regard si rempli de grâce de Mme de Rênal, il oublia une partie de sa timidité. Bientôt, étonné de sa beauté, il oublia tout, même ce qu’il venait faire. Mme de Rénal avait répété sa question.
– Je viens pour être précepteur, madame, lui dit-il enfin, tout honteux de ses larmes qu’il essuyait de son mieux.
Mme de Rênal resta interdite, ils étaient fort près l’un de l’autre à se regarder. Julien n’avait jamais vu un être aussi bien vêtu et surtout une femme avec un teint si éblouissant, lui parler d’un air doux. Mme de Rênal regardait les grosses larmes qui s’étaient arrêtées sur les joues si pâles d’abord et maintenant si roses de ce jeune paysan. Bientôt elle se mit à rire, avec toute la gaieté folle d’une jeune fille, elle se moquait d’elle-même et ne pouvait se figurer tout son bonheur. Quoi, c’était là ce précepteur qu’elle s’était figuré comme un prêtre sale et mal vêtu, qui viendrait gronder et fouetter ses enfants!
Le rouge et le noir, Stendhal, 1830. (chapitre 6)
Le rouge et le noir la rencontre (chapitre 6): explication linéaire
Problématique: en quoi la rencontre entre les deux héros est-elle surprenante?
Introduction: Le rouge et le noir la rencontre (chapitre 6)
Le rouge et le noir est un roman publié par Stendhal, auteur réaliste en 1830. L’oeuvre relate l’amour impossible entre Mme de Rênal, une femme mariée et mère de famille et Julien Sorel, le jeune précepteur de ses enfants. Or le chapitre 6 raconte la scène qui apparaît comme l’élément déclencheur du récit. En effet, nous est racontée la scène de première rencontre entre les deux personnages.
1er mouvement: la rencontre
- D’abord, l’extrait s’ouvre en point de vue omniscient, avec une remarque pour décrire Mme de Rênal: « avec la vivacité et la grâce qui lui étaient naturelles quand elle était loin du regard des hommes. »
- Immédiatement, se produit la rencontre avec un être défini par sa condition sociale inférieure, comme l’indiquent « paysan » ou encore sa veste de « ratine » (tissu de qualité inférieure). Il apparaît donc en opposition avec Mme de Rênal, épouse du maire et dont le patronyme réfère à l’aristocratie).
- De plus, l’inconnu est défini par son âge, sa jeunesse. L’adjectif qualificatif « jeune » et le groupe nominale, « presque encore un enfant » le montrent. D’ailleurs, il apparaît dans une situation très puérile, comme en atteste la proposition subordonnée relative: « qui venait de pleurer ».
- Enfin, le premier mouvement s’achève par une phrase descriptive faisant le portrait vestimentaire de ce jeune inconnu: « chemise bien blanche » et « veste » qui illustrent sa propreté.
2ème mouvement: un portrait protéiforme
- Ensuite, le portrait physique de ce jeune inconnu, reposant sur le lexique du visage « teint, yeux », est sublimé. En effet, l’adverbe d’intensité « si » est employé pour renforcé chaque caractéristique: « blanc » et « doux ». Ainsi, Mme de Rênal s’imagine qu’il s’agit là d’une paysanne venue voir le maire: « une jeune fille déguisée ». Julien apparaît donc initialement comme un être dont le genre sexuel n’est pas affirmé.
- Par ailleurs, ce bref portrait de Julien Sorel est également l’occasion de la description de Mme de Rênal comme le montre la proposition subordonnée: « que l’esprit un peu romanesque de Mme de Rênal ». Mme de Rênal est donc dépeinte comme un personnage fantasque.
- Ensuite, le groupe nominal « pauvre créature » semble rendre problématique l’apparence humaine de cet inconnu.
- Enfin, ce mouvement s’achève par l’apostrophe qui, une fois encore réduit Julien Sorel à un statut puéril: « Que voulez-vous ici mon enfant? »
3ème mouvement: l’échange
- Tout d’abord, le lexique du regard est très présent dans ce passage: « frappé du regard », à se regarder ». Il témoigne de la première rencontre qui repose en première instance sur l’échange de regards.
- En outre, ce mouvement repose sur l’échange de paroles, amorcé à la fin de la partie précédente et qui se poursuit.
- Ce mouvement est perçu à travers les yeux de Julien Sorel. En effet, celui-ci est d’abord surpris par une voix. Lorsqu’il regarde celle qui s’adresse à lui, ses qualités le surprennent: « grâce », « beauté ».
- D’ailleurs, Julien est comme saisi par ce visage si beau car il est un moment frappé d’amnésie. Le verbe « oublier » est effectivement utilisé par deux fois. « Il oublia sa timidité » et « »il oublia tout, même ce qu’il venait faire ».
- Or, si précédemment Mme de Rênal s’adresse à lui en tant que femme plus mature, le jeune homme lui répond avec une apostrophe qui marque le respect: « Je viens pour être précepteur, madame ».
- Par ailleurs, l’échange se produit à travers le regard : « se regarder ».
- Ensuite, tous deux semblent interdits. D’abord le texte emploie cet adjectif pour Mme de Rênal mais Julien semble interdit face à une femme si parfaite. Les adverbes renforçant les qualificatifs mettent en valeur le physique de Mme de Rênal: « aussi bien vêtu », « teint si éblouissant ». Ainsi, le regard porté par Julien sur Mme de Rênal est bien celui d’un jeune homme séduit par la beauté d’une femme.
- Quant au regard de Mme de Rênal sur lui, il récapitule les caractéristiques initiales: « Mme de Rênal regardait les grosses larmes qui s’étaient arrêtées sur les joues si pâles d’abord et maintenant si roses de ce jeune paysan. » Ainsi, sa jeunesse et sa classe sociale prédominent.
- Ensuite, le lexique du rire met en évidence la joie que ressent Mme de Rênal à l’arrivée de Julien. En effet, celle-ci craignait que son mari n’engage un vieux prêtre qui battrait ses enfants à chaque fois qu’ils se tromperaient dans leur leçon. La dernière phrase exclamative montre le décalage avec sa crainte.
- Paradoxalement, elle semble rajeunir au contact de Julien Sorel « avec toute la gaieté folle d’une jeune fille ».
Nous espérons que ce cours « Le rouge et le noir la rencontre (chapitre 6) » a pu t’aider. Si tu as des remarques ou des questions, poste-les juste en dessous dans les commentaires.
-Dissertation sur Le rouge et le noir
–Une autre scène de rencontre amoureuse: le chapitre 1 de L’Oeuvre d’Emile Zola.
–Le rouge et le noir: texte intégral en pdf (à télécharger)
waw votre explication linéaire est très précise .
Bravo vous m’avez beaucoup aider.
Bonjour,
Merci de ce message Lili!
Bonjour,
je vous écris parce que j’aimerais savoir sur quelle oeuvre puis-je faire une ouverture? Merci pour l’analyse bien expliquée
Bonjour Lisa,
L’ouverture peut-être faite sur différentes oeuvres: soit sur une autre oeuvre réaliste soit sur une autre oeuvre relatant une rencontre amoureuse.
Bonjour quel est la problématique svp. ?
Bonjour Riahi,
La problématique est en rouge: « en quoi la rencontre entre les deux héros est-elle surprenante? »
Que peut ont mettre comme conclusion ?
Bonjour Riri,
Tout dépend, à l’oral ou à l’écrit? A l’écrit, la conclusion doit être plus aboutie alors qu’à l’oral en raison du peu de temps dont tu disposes, il faut vraiment résumer (une ou deux phrases suffisent).
Bonjour, que pourrait-on mettre comme conclusion à l’oral ? merci
Il faudrait reprendre les principaux points de l’explication linéaire donc le portrait, la rencontre amoureuse et l’échange.
Ce n’est pas un commentaire. C’est une analyse linéaire.
Bonjour Cerne,
Il existe différents types de commentaire dont le commentaire composé effectué à l’écrit, en particulier dans le cadre du bac. Le commentaire peut également être linéaire, c’est le cas de l’explication linéaire, selon la formule consacrée, pour le bac.