LE COCHE ET LA MOUCHE

Le coche et la mouche est extraite du livre VII des Fables de Jean de La Fontaine. Elle paraît pour la première fois en 1678. Or, La Fontaine s’inspire de la fable de Phèdre,  » Tibère et l’intendant ». Nous nous proposons, après le texte intégral, d’effectuer l’explication linéaire de la fable. Nous nous attarderons sur la morale en nous appuyant sur l’expression « la mouche du coche ». Enfin, nous reviendrons au texte d’origine.

On voit l'illustration de la fable le coche et la mouche de La Fontaine.

1. Le coche et la mouche: texte

LE COCHE ET LA MOUCHE

Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé,
Et de tous les côtés au soleil exposé,
            Six forts chevaux tiraient un Coche.
Femmes, Moine, Vieillards, tout était descendu.
L’attelage suait, soufflait, était rendu.
Une Mouche survient, et des Chevaux s’approche ;
Prétend les animer par son bourdonnement ;
Pique l’un, pique l’autre, et pense à tout moment
            Qu’elle fait aller la machine,
S’assied sur le timon, sur le nez du Cocher ;
            Aussitôt que le char chemine,
            Et qu’elle voit les gens marcher,
Elle s’en attribue uniquement la gloire ;
Va, vient, fait l’empressée ; il semble que ce soit
Un Sergent de bataille allant en chaque endroit
Faire avancer ses gens, et hâter la victoire.
            La Mouche en ce commun besoin
Se plaint qu’elle agit seule, et qu’elle a tout le soin ;
Qu’aucun n’aide aux Chevaux à se tirer d’affaire.
            Le Moine disait son Bréviaire ;
Il prenait bien son temps ! une femme chantait ;
C’était bien de chansons qu’alors il s’agissait !
Dame Mouche s’en va chanter à leurs oreilles,
            Et fait cent sottises pareilles.
Après bien du travail le Coche arrive au haut.
Respirons maintenant, dit la Mouche aussitôt :
J’ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
Ca, Messieurs les Chevaux, payez-moi de ma peine.

Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
            S’introduisent dans les affaires :
            Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés.

2. Explication linéaire de la fable

Mais d’abord que signifie l’expression « la mouche du coche »? Selon le CNRTL, il s’agit d’une « Personne qui s’agite beaucoup et inutilement dans une affaire en s’illusionnant sur son importance. »

Problématique : Comment La Fontaine dénonce-t-il les orgueilleux qui se croient importants?

Premier mouvement :le décor (vers 1 à 5)

  • La Fontaine montre la difficulté de la situation. Ainsi, les deux premiers alexandrins montrent une situation ardue. En effet, la gradation des adjectifs « montant, sablonneux, malaisé » le montrent.
  • De plus, le deuxième alexandrin renforce cette difficulté topographique avec une météo accablante: « et de tous les côtés au soleil exposés. »
  • Ensuite, l’énumération « femmes, moine, vieillards » met en évidence la nécessité de faire descendre les passagers du coche.
  • Toutefois, les chevaux sont épuisés, en témoigne une fois encore la gradation: « suait, soufflait, était rendu ».

Deuxième mouvement: la mouche (vers 6 à 16)

  • Or, l’arrivée de la mouche apparaît en décalage avec la difficulté de la situation. Elle semble bien frêle pour cette mission salvatrice.
  • Ensuite, il met en évidence son agitation à travers des verbes d’action. Ainsi, le parallélisme de construction en témoigne: « Pique l’un, pique l’autre ».
  • De même, « va, vient, fait l’empressée » montre son dynamisme.
  • Mais cette première caractéristique de l’agitation est complétée par un second travers: son orgueil. Ainsi, plusieurs évocations montrent ce défaut: « prétend », « pense […] qu’elle fait aller la machine », « s’en attribue uniquement la gloire ».
  • Nous pouvons alors noter un décalage entre la mouche, sujet prosaïque, et le registre épique dans lequel elle intervient.
  • Ainsi, nous pouvons relever un champ lexical de la guerre: « char », « gloire », « sergent de bataille », « victoire ».
  • Dès lors, nous pouvons noter un décalage comique entre la mouche et la grandeur de sa mission.

Troisième mouvement: les mots de la mouche(vers 17-28)

  • D’abord, notons que les propos de la mouche sont relayés par le narrateur. Autrement dits, ses propos sont repris dans un discours indirect.
  • Ensuite, ses paroles s’inscrivent dans une suite de propositions subordonnées conjonctives complément du verbe « se plaindre ».
  • Puis, le narrateur la ridiculise en la désignant par la personnification « Dame Mouche ».
  • De même, il emploie à son propos l’hyperbole « cent sottises ».
  • Par ailleurs, aux vers 21-22, La Fontaine déplore de même l’inutilité de la femme et du moine, en témoigne l’usage de l’adverbe « bien » par deux fois.
  • Enfin, vers 26, la prétention de la mouche transparaît au discours direct. Son ridicule est montré à travers l’usage du nous de majesté. (« nos gens »)

Quatrième mouvement: la morale (vers 29 à la fin)

  • D’abord, La Fontaine s’exprime au présent de vérité générale donnant à la morale une portée universelle.
  • De plus, il articule les deux pans de la fable avec un connecteur logique marqueur de la conséquence: « ainsi ».
  • La Fontaine condamne l’attitude de ceux qui font les empressés et en deviennent importuns. Ainsi, ceux qui se croient indispensables par le agitation se trouvent en fait indésirables.

3. La fable de Phèdre

TIBÈRE ET L’INTENDANT

Il y a dans Rome une race de gens empressés,  toujours en course, affairés sans cause,  essoufflés sans motif ; ne faisant rien en faisant beaucoup, et aussi à charge à eux-mêmes qu’insupportables à tous.  Je voudrais bien, si c’était chose possible, les corriger  par ce récit véridique : écoutés, car il en vaut la peine. Tibère en se rendant à Naples,  s’arrêta dans son palais de Misène, villa bâtie par Lucullus sur le sommet de la montagne,  d’où l’on voit à ses pieds la mer de Toscane, et dans le lointain, la mer de Sicile. Comme un de ces esclaves officieux, la tunique relevée par une écharpe de lin d’Egypte aux franges tombantes, vit le prince se promener dans les superbes jardins, il prit un arrosoir de bois, et jeta de l’eau dans les allées poudreuses, faisant parade d’un si grand service. On se moqua de lui. Ensuite, gagnant au plus court,  il reparaît dans une autre allée, et en abat la poussière.  César reconnut notre homme et comprit qu’il se figurait recevoir je ne sais quelle récompense. « Approche, » lui dit-il. Aussitôt l’esclave d’accourir, transporté d’espérance et de joie, Alors l’empereur, déposant sa majestueuse gravité, lui dit en riant : « Tu as fait là peu de chose, et ta peine est perdue ; car je ne donne pas des soufflets à si bon marché. »

Phèdre (14 av JC- 50 ap JC)

Le coche et la mouche: conclusion

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